Familles, amis et connaissances

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Terme
TAILHADE, laurent

TAILHADE, Laurent (1854-1919), écrivain français. Tout d’abord parnassien, puis gonfalonier des décadents, le poète pyrénéen se taille un certain succès dans le monde des lettres, à partir des années 1890, avec la publication de ses féroces ballades reprises, dès 1891, dans son recueil Au Pays du Mufle. Après avoir défendu « le beau geste » de Vaillant,  il est victime d’un attentat alors qu’il dîne au restaurant Foyot le 4 avril 1894. Sa réclame est faite et lui ouvre les portes de la grande presse parisienne. Les articles qu’il signe sous le pseudonyme de Tybalt à L’Echo de Paris lui  attirent une ribambelle de duels. En 1898, il s’engage dans le combat dreyfusard derrière Zola, à L’Aurore et aux Droits de l’Homme. Les textes qu’il signe alors seront repris en partie dans À travers les grouins et Imbéciles et Gredins. Proche de Sébastien Faure, Tailhade collabore parallèlement à la presse anarchiste (Le Libertaire, Le Journal du Peuple…), propre à assouvir l’épanchement de sa bile anticléricale. En 1906, déçu par ses engagements passés, il semble tourner casaque et se diriger vers le trottoir de droite. La plupart des historiens de la littérature s’arrêtant là, nous nous permettrons d’ajouter que Tailhade vivra treize années supplémentaires, durant lesquelles il survivra tant bien que mal grâce à ses talents de journaliste, de traducteur et de conférencier et qu’il saluera le surgissement de la Révolution d’Octobre dans les colonnes de La Vérité.

            On peut dire que Mirbeau fut d’abord amusé par un Tailhade qui constitue alors une sorte d’attraction parisienne incontournable, entre la Tour Eiffel et Monsieur Joseph Pujol. C’est avec cette image à l’esprit que Mirbeau se presse à la conférence que donne Tailhade sur L’Ennemi du Peuple en novembre 1893. À force de se côtoyer dans les mêmes salles de rédaction – L’Aurore, Le Journal du Peuple, par exemple – et de lutter pour les mêmes causes – la libération d’Oscar Wilde, le souvenir de la Commune et surtout pour Alfred Dreyfus –, les deux hommes finissent par tisser des liens d’amitié. Aussi Mirbeau demande-t-il à Tailhade d’introduire L’Épidémie dans une conférence à la Maison du Peuple de Montmartre en juin 1900. Mais c’est l’année suivante, lors de la condamnation de Tailhade à un an de prison pour son article du Libertaire, que Mirbeau va s’employer à venir en aide au prisonnier de la Santé, notamment en lui trouvant des fonds dus à la générosité de Joseph Reinach et un éditeur – Fasquelle – pour sa traduction du Satyricon. C’est encore Mirbeau qui le fera entrer à L’Humanité en 1904. Pour autant, les relations entre les deux littérateurs vont se détériorer totalement avec la publication du Salon de Madame Truphot la même année. Œuvre de Fernand Kolney, beau-frère de Tailhade, ce – mauvais – roman à clefs avait probablement été initié à quatre mains, mais nous savons que seul Kolney avait poursuivi l’ouvrage et que, de fait, le contenu avait largement échappé au contrôle de Tailhade. Or, tout un chapitre était consacré à démolir Mirbeau – dépeint sous les traits de Georges Sirbach –, ainsi qu’Alice Regnault. Encouragé par Jehan Rictus – qui, dans ce roman, avait eu plus que sa part – à porter l’affaire devant les tribunaux, Mirbeau choisit de se taire, tandis que Tailhade tardait à rompre avec son beau-frère, ce qu’il fit un an plus tard. Trop tard, à l’évidence,  pour panser les blessures d’une amitié qui ne se renoua jamais par la suite.

G. P.

 

Bibliographie : Gilles Picq, Laurent Tailhade, ou De la provocation considérée comme un art de vivre, Maisonneuve et Larose, 2001, 832 pages ; Gilles Picq, « Mirbeau-Tailhade : un malentendu », Cahiers Octave Mirbeau, n° 10, 2003, pp. 150-158.

 

 


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